La Chute du Royaume d'Azeroth

Contée par Aegwyn, Gardienne de Tirisfal (manuscrit datant de 603).
"Je me nomme Aegwyn, et voici mille ans que j'écume toutes les contrées de ce monde, me consacrant entièrement à la sauvegarde de ces peuples et de leurs terres, tentant de les protéger des puissants tentacules des Ténèbres de l'au-delà. J'ai regardé vaincre les plus puissants des souverains, puis j'ai assisté à leur perte. J'ai vu les esprits les plus nobles accomplir les plus louables actions, comme j'ai vu les plus fourbes fomenter en secret et conspirer contre l'humanité.

Mais je n'ai que récemment été impliquée directement dans les affaires Humaines. Depuis la nuit des temps, mon ordre est chargé de protéger les mortels Humains des mystères des Ténèbres de l'au-delà, de les épargner des atroces maléfices de ces mondes d'ailleurs. Les pouvoirs qui nous furent conférés pour combattre les forces noires de l'Enfer sinueux sont immenses, et notre longévité excède même celle des Elfes. Une lourde contrepartie fut exigée pour l'obtention de ces considérables pouvoirs : le gardien n'a pas le droit d'intervenir dans le monde des Humains avant que ne soit venu le moment de trouver un successeur digne d'assurer la charge de Gardien. Ainsi ai-je procédé. Moi - Aegwyn, ultime Gardienne de l'Ordre de Tirisfal - ai jugé que mon heure était arrivée.

Le Royaume d'Azeroth avait vu par quarante-deux fois les arbres perdre leur manteau de verdure depuis que pour la première fois je pénétrai en ses terres pour quérir l'illusionniste Nielas Aran. C'est lui que j'avais choisi pour engendrer l'héritier de mes pouvoirs. Ce mortel n'était pas dénué de talent pour la magie, et je pensais qu'il serait le père idéal pour mon enfant... je ne me trompais point. Il me donna un fils, qui naquit en automne de l'an de grâce 559. Je lui donnai le nom de Medvih - le gardien des secrets dans la langue antique des Elfes. Je lui transmis tout mon savoir, tous mes pouvoirs pendant la première année de sa vie. Mais j'avais au plus profond de son âme enfoui ces secrets qui ne se révéleraient à lui qu'au jour où il atteindrait la maturité nécessaire.

Je pensais alors avoir accompli mon devoir en ce monde, je confiai mon fils aux bons soins de la famille de son père et m'apprêtai à passer sur l'autre rive... De loin pourtant, je veillais sur lui, je le regardais grandir. Je pensais que l'altruisme généreux de Tirisfal le guiderait dans ses choix, l'aiderait à tempérer son coeur et à élever son esprit jusqu'à le rendre digne de réaliser ce que je pensais être son destin : prendre ma succession et devenir à son tour Gardien. La veille du jour de ses treize ans, les pouvoirs enfouis au plus profond de son âme s'éveillèrent. Incapable de faire face à la violence des énergies cosmiques qui déferlèrent en lui, Medvih fut victime d'un choc psychique très traumatisant. La bonté des pères du clergé de Northshire lui rendit la paix. Ils prirent en effet mon enfant sous leur protection pendant six longues années, et apportèrent soins et réconfort à son corps meurtri.

Medvih finit par revenir à la vie, en pleine possession semblait-il de ses pouvoirs et de ses facultés. Pourtant, malgré la façade confiante, presque arrogante qu'il offrait au regard des autres, je sentais bien, moi, que mon fils portait en lui une chose maléfique et corrompue. Les forces de l'Enfer sinueux avaient perverti la sagesse et les pouvoirs qu'il avait reçus à la naissance en atteignant la partie Humaine en lui. Son âme était devenue mauvaise, et le resterait à jamais. Il fallut attendre la première vague d'assaut des affreuses créatures que sont les orcs pour que je prenne réellement la mesure du danger que représentait mon fils...

Medvih décida d'explorer les limites du pouvoir de manipulation que lui conféraient les énergies magiques qu'il s'était vu confiées si brutalement. Bravant les interdits, il se plongea dans la science nécromantique, se mit en tête de comprendre les mystères de la vie et de la mort. Il pactisa avec les Démons des sphères inférieures, utilisant leurs facultés pour renforcer les siennes. Il devenait chaque jour plus avide de pouvoir, chacun de ses succès l'entraînant un peu plus bas dans les abysses de la folie. Il explora les lointaines sphères astrales, sonda les mystères des Ténèbres de l'au-delà. C'est alors qu'il errait dans le tourbillon sans fin de ces hallucinations cosmiques que Medvih traversa pour la première fois l'infranchissable frontière du monde de l'au-delà pour apercevoir l'espace d'un très court instant les effroyables, les monstrueuses créatures de ces lieux. Medvih avait enfin trouvé l'arme absolue qu'il avait tant cherchée... Fermement décidé à se rendre maître d'Azeroth, Medvih se servit des connaissances que Tirisfal lui avaient transmises pour conclure un arrangement avec le sorcier Gul'dan - le plus puissant des seigneurs régnant sur le monde sombre et sanguinaire qui hantait ses visions. Communiquant avec Gul'dan grâce à des transes profondes et des projections astrales, Medvih prétendit qu'un tombeau antique enfoui sous les flots renfermait un pouvoir défiant l'imagination. Sargeras, le Seigneur des Démons que j'avais vaincu à l'issu d'un terrible duel huit cents ans plus tôt était bien dans ce tombeau. Il me paraissait toutefois impossible de savoir si ce sépulcre renfermait les pouvoirs de Sargeras ou seulement sa dépouille. Je l'ignorais moi-même.

Pourtant la seule idée de pouvoir posséder les pouvoirs d'un Seigneur des Ténèbres suffisait à l'insatiable Gul'dan pour accepter le marché de Medvih. Medvih proposait de révéler à Gul'dan la position du Tombeau qui mettrait le monde à ses pieds. Medvih réclamait en échange l'anéantissement total de ceux qu'il estimait être les seuls susceptibles de s'opposer à son irrésistible ascension : les habitants du grandissime Royaume d'Azeroth. Ainsi, en l'an de grâce 583, Medvih ouvrit la première de ses portes artificielles entre le royaume lumineux d'Azeroth et le monde sanglant des orcs. L'heure du trépas approchait pour moi. Je décidai pourtant de rendre visite à Medvih en sa tour mystique, dans l'espoir de le dissuader d'emprunter un chemin qui à coup sûr mènerait à sa perte. Mais les pouvoirs qui autrefois furent ceux du bon Tirisfal étaient pervertis en lui, et mes prières furent impuissantes. J'eus beau employer toute l'énergie qui restait à mon corps vieilli, je lui avais cédé tous mes pouvoirs depuis si longtemps qu'il me domina facilement avant de me chasser hors de sa vue."

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